Taux de THC légal en Europe : bientôt 0,3% au lieu de 0,2%

Taux de THC légal en Europe : bientôt 0,3% au lieu de 0,2% 1

Octobre 2020 : le Parlement européen vote pour une évolution du taux légal de THC associé à la culture du chanvre. Si le Conseil de l’UE et la Commission européenne ne s’y opposent pas, cette limite passera de 0,2 à 0,3%.

Le contexte

Alors que les cultures et les utilisations du chanvre industriel progressent dans le monde entier, et ce dans de multiples filières, le CBD (filière “chanvre bien-être”) a connu un développement fulgurant à tel point qu’il représente un peu plus de la moitié des revenus de l’industrie mondiale du chanvre. Dans cet environnement en plein essor, la limite légale dans l’UE à 0,2% au maximum pour la teneur en THC défavorise les acteurs européens du CBD ou “cannabis light”. Cette limite constitue un obstacle majeur, car elle réduit drastiquement la gamme des cultures de chanvre possible pour les cultivateurs. Le consommateur de “cannabis/chanvre bien-être” est au final la principale victime de cette limitation (qualité des produits). Toute l’industrie du chanvre bien-être, y compris les agriculteurs, fait donc pression depuis un long moment maintenant pour tenter de desserrer cette contrainte légale.

Historique

Des limites de THC ont été imposées au chanvre industriel dès 1984 (0,5%, à l’époque). En 1987, ce seuil fut abaissé à 0,3%; puis, en 1999, le seuil a de nouveau été abaissé à 0,2%, sous prétexte de vouloir réduire la culture de marijuana illicite dans les champs de chanvre industriel.

23 octobre 2020 : le Parlement européen vote pour une évolution du taux de THC

La proposition d’augmenter le taux de THC légal, longtemps défendue par l’Association Européenne du Chanvre Industriel (EIHA), a été incluse dans la réforme de la Politique Agricole Commune (PAC), puis enfin adoptée par le Parlement le 23 octobre 2020.

Cette proposition sera discutée avec le Conseil de l’UE et la Commission européenne dans le cadre de négociations tripartites qui s’inscrivent dans le processus d’adoption des actes de l’Union européenne. Cela signifie que, même si l’Association Européenne du Chanvre Industriel considère le vote du Parlement comme une victoire, ces propositions ne pourront être néanmoins appliquées si les deux autres organismes (le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne) décident qu’elles ne sont pas conformes.

Le vote du Parlement est intéressant, car – à l’instar du processus de légalisation qui avance à grand pas en Amérique du Nord (USA, Canada) -, il reflète une confiance renouvelée de notre société à l’égard du cannabis, cette merveilleuse plante capable de fournir de multiples applications médicinales ou bien-être, ouvrant ainsi aux agriculteursde nouveaux débouchés.

Que représente cette nouvelle pour les acteurs de la filière chanvre ?

Selon Daniel Kurse, président de l’EIHA, ceci constitue un moment historique pour l’industrie européenne et les agriculteurs. Il déclare : « Enfin, l’Union européenne a à nouveau des règles du jeu équitables avec le secteur mondial du chanvre ».

M. Coxall, président de Hemp Tank et directeur de la Conformité de la Cannabis Trades Association, confirme : « Augmenter le niveau de THC dans toute l’Europe est une excellente nouvelle pour l’industrie du CBD et les agriculteurs européens ».

Derrière cet enthousiasme, il y a une bonne raison ! En augmentant le taux de THC, on augmente toutes les teneurs en cannabinoïdes. Le relèvement du plafond va donc permettre de mieux exploiter le potentiel de la plante. Les possibilités de cultures et de produits s’en trouvent démultipliées.

L’impact sur les cultures

Aligner le taux de THC sur celui des principaux concurrents de l’Union européenne, à savoir la Chine, le Canada et les Etats-Unis, donnera accès aux agriculteurs européens à une plus grande variété d’espèces de chanvre. Les ratios de CBD en seront directement impactés, à la hausse, la teneur en CBD dans la plante augmentant proportionnellement à la teneur en THC. Non seulement cette augmentation d’un dixième va permettre la réintroduction de certaines variétés de chanvre “dormantes” (qui dépassent les 0,2 % de THC), mais elle donnera aussi un coup de pouce à la recherche agronomique en Europe.

Plus concrètement, le nombre de souches de chanvre disponible en Europe était limité à 60 variétés. Désormais, d’autres variétés du Nord et de l’Est pourront être exploitées, car elles présentent des niveaux de THC supérieurs à 0,2%, mais inférieurs à 0,3%. Ces nouvelles variétés seront additionnellement capables de s’adapter à différents sols et à différents climats.

La science des semences pourra en outre se concentrer sur le développement de variétés plus spécialisées pour l’industrie des fibres et des céréales (entre autres).

Quelles sont les autres bases de cette négociation ?

En Août 2020, l’EIHA avait porté à l’égard de la Commission européenne des accusations selon lesquelles désigner des extraits de chanvre industriel comme drogue dans la législation européenne peut tuer le secteur du chanvre dans l’Union européenne.

Le vote du Parlement pour l’inclusion du chanvre dans la liste des produits qui peuvent être réglementés via des normes de commercialisation est donc venu mettre fin à ces propos. Ainsi, amélioration des conditions économiques, augmentation de la production, augmentation de la commercialisation ou encore amélioration de la qualité des produits agricoles, sont quelques-uns des principaux objectifs de cette démarche.

Des règles ont d’ailleurs été établies, afin de mettre au point des normes, telles que l’étiquetage, l’emballage et les définitions techniques, ainsi que le type et le lieu de l’élevage du chanvre. L’établissement de telles normes de commercialisation permettra une amélioration de la qualité et la standardisation des produits à base de chanvre.

En conclusion

Une hausse d’un dixième de pourcent pourrait paraître mineure ; mais dans le cas du chanvre et de sa teneur en THC autorisée, cela équivaut à 50% d’augmentation, ce qui est clairement majeur ! S’il est définitivement adopté, le relèvement dans l’Union européenne du taux légal de THC de 0,2% à 0,3% permettra :
– aux cultivateurs et aux transformateurs européens de chanvre de mieux se battre face à la concurrence de leurs homologues américains, canadiens ou chinois;
– une plus grande variété d’applications thérapeutiques, produits bien-être et autres aliments infusés au CBD.

Dans un monde post-Covid éprouvé, où des économies nationales – comme l’Italie et la France (traditionnellement fortes sur la production du chanvre industriel) -, souffrent particulièrement, espérons qu’un tel « coup de pouce » sera accueilli favorablement et que cette mesure votée par le Parlement le 23 octobre dernier sera bientôt définitivement adoptée.